MADEINNOVEMBRE

LE CORPS DE LA BALEINE, CHRONIQUES.
IV. L’après la Baleine.

La Baleine n’est plus.
Toute sa chair de rêve, dépecée, salée, séchée.
Son squelette incroyable éparpillé ci et là.

TERRE.
La Terre a mangé la Baleine et nous avons une Terre, désormais comme tout navire.
Tout au plus des cabanons et des granges.
Mais, de beaux cabanons. De solides granges. Et un village est né.

Les membres de la Baleine, le fier équipage,
les flamboyants, me diriez-vous : Où sont-ils ?

Ici et là et ceux-celles qui sont là, vous dirais-je : les mains dans la Terre donnée.
Et, ça pousse bien ?
Oh oui, nous avons su la rendre fertile !

GUERRE ?
Oh, nous avons changé d’armes, pourrait-on dire. Les ateliers produisent diversement et n’ont que peu de crainte à imprimer….

Faire couler le sang, le rhum !?
Nous brassons notre bière, élevons nos animaux, le seul sang.

MER ??
Ah, mer de tous les vices… ah ah !

Parfois, parfois… Viennent et vont, y retournent, quelques mousses ou capitaines d’antan accostent parfois. Sachez que le Terrain concédé par les autorités donne, nous permettant ouverture maritime, voies navigables, sur une petite crique, fort jolie…

Mais.
Aussi le prochain exil.
Rats des villes dans les champs
Le fromage est derrière une cage, n’en avoir que les miettes grappillées, main tendue.

Cette crique. convoitée. Négociants, marchands, touristes (qu’est-ce donc ?) se la disputent parait-il. Nous n’avons que de vagues rumeurs de notre bon gouverneur.

Je fais semblant, je faiblesse.

Montrer les dents, ne nous chasserons pas tout de suite, pas comme ça.
Montrer les dents encore le fis-je.

Et puis parti sur mon navire, patiemment, discrètement construit.
Au bon vouloir du Gouverneur : J’un jour reviens – ne trouverais plus la crique ?
_______________________________________________________________________________
Au gré des vents de ma vie passée, suis allé de port en port revoir les amitiés, en découvrir nouvelles, trouver amour. Navigateur presque solitaire.
_______________________________________________________________________________

Une année passa presque.
Je reviens, en courtoisie, à proposer mes bras, je mouillerais un peu ici.

La crique est toujours là !

Je visite le village et constate qu’il continue de s’agrandir.
Mes bras offerts à petits labeurs sont accueillis. Le village s’est agrandi et a grandi.

Je marche dans un presque bourg, sur les années, nouvelles échoppes, nouveaux métiers, un forum, un marché, une place, un jardin.

Nous avions construit tout cela ? L’avais-je oublié ? Non. Le revoir : c’est bon. C’est un port temporaire, destiné à s’exiler encore ailleurs, de se continuer ; inlassablement se reconstruire…

C’est la fin de l’été le temps de notre rituel de feu, dans le soleil encore, avant le peut-être dernier hiver sur ces terrains.

L’après-après Baleine, ce sera quoi ?

J’ai questionné mes compagnons et un subordonné du Gouverneur, et l’on m’a assuré que ces terres que nous avons cultivées, construites, fertilisées, il y reste quelques années encore avant l’après-après… Et cet… après-après ?

Je ne sais vraiment, il est question d’un petit lopin au beau milieu du Bourg…
Ce sera sûrement bon…
Mais ce sera sans moi.
Et je veux encore croire que ce sera joie d’y revenir… parfois.
_______________________________________________________________________________
_______________________________________________________________________________
Le corps de la baleine, fin.
Les textes précédents ici : clic

Transposition Flibustière de 11 années de friche artistique lyonnaise.
De juillet 2004 à octobre 2015, avec des pauses.
Avoir pris, savoir à qui, avec qui, comment, avoir appris, savoirs acquis.
Et me voilà reparti, nouvelles aventures.
Une belle pensée à toutes et tous mes camarades de Flibuste.

Raphaël Sarfati
untiroirouvert.net